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Voyage dans le réseau: spectacle de rue contre les violences sexistes

LE DESOPPRESSOR 3000, forum de rue, par la Cie Arlette Moreau, de POITIERS. compagniearlettemoreau@gmail.com

Le 25 novembre 2023, la bande jouait deux fois en région parisienne. J’ai eu le plaisir de les voir, avec Nicole, à Cachan.
4 comédiens : Benjamin est le bonimenteur parfois le joker, Célestin, elle, est souvent la jokère, mais elle joue parfois un troisième personnage dans la scène.
La plupart du temps : deux personnages sur scène, toujours incarnés par les mêmes acteurs : « H » Hector qui est l’oppresseur  joué par Yoann. Ce personnage est masqué genre super héros négatif, Et « D » Daphnée, jouée par Marie, l’opprimée.
D’une grand roue multicolore à faire tourner par quelqu’un du public sort une des 12 situations de sexisme ordinaire, de violence «légère » faite aux femmes, qu’ils ont préparées.
Les 2 acteurs -parfois rejoints par Célestin pour un troisième personnage- la jouent aussitôt.
C’est rapide, très rapide : une image animée, quelques répliques, quelques secondes ! Ensuite le ou la tourneuse de roue est invitée à dire ce qu’elle a vu comme injustice, puis à venir sur scène AJOUTER un personnage de son choix : souvent un ou une amie, ou un témoin inconnue…
Les titres présents sur la roue, sont intrigants, exemples :
LA BLAGUE DE L’ABÎME : dans le couple, H fait une blague sexiste ; elle ne sourit pas, il conclut par « on peut plus rire de rien avec vous »!
LA MAIN DE L’ENFER (dans le bus, la main de H suit,cherche et met une « main au cul » à D)
LE PROTECTEUR DESTRUCTEUR le père qui surveille la tenue de son adolescente
LE BISOU DES TENEBRES du tonton un peu trop pressant
etc…
Parfois c’est au sein d’un couple, parfois entre un homme et une femme qui ne se connaissent pas (dans un bar, un parc, un bus), parfois entre amis, parfois père-fille…

Les interventions s’enchainent dans la vivacité, ponctuées par un jingle « Le Désoppressor 3000, mais tu es CA-PA-BLE ! (de lui résister) » et une « cérémonie » de quelques secondes où l’intervenant reçoit sous les applaudissements le BADGE D’OR sur lequel est écrit « ch’suis capab » Couleurs, chaleur humaine, côté camelot, tout se passe dans la bonne humeur et le sourire, on applaudit souvent, on compte en choeur « 3 , 2, 1… en jeu ! » avant chaque scène ou impro. Comment faire venir sur scène : ça commence par un simple « qui veut bien tourner la roue ? » (ça semble pas trop exigeant, puis… c’est parti ! La synthèse finale : la jokère donne souvent la parole à l’opprimée, plutôt que de parler elle-même. Puis la « cérémonie » joue le rôle d’accompagnement-remerciement de la spectatrice.

Nicole et moi sommes chacun venus tourner la roue et jouer sur scène, bien entendu ! Pour ce 25 novembre, ils jouaient à côté de stands féministes avec livres, brochure et adresses, qui distribuaient notamment le fameux « violentomètre » et affichaient les définitions de « la violence » proposées par les passant·es. A côté, les jeunes des centres sociaux proposaient des boissons chaudes et des crèpes ! Il faisait froid à Cachan, mais du soleil et un temps sec. A 17h et quelques, quand même, il était temps d’arrêter.

On a échangé ensuite un petit moment avec l’équipe, au chaud.
Certains se sont formés au CTO Paris, puis ont formé les autres. La Cie compte pas mal de monde (une douzaine ?) qui créent des TF « pro » et les vendent. Mais une trentaine de personnes (comédiens ou pas) peuvent aussi participer à la création d’un « théâtre invisible ». « Une idée, hop, on la travaille une journée en grand groupe, tout le monde est bénévole, et on la joue… parfois dans la journée. Ensuite, grandes discussions sur l’intervention ! ».
Rappelons que nous avions entendu parler d’eux par Bastien (pas a passo) qui avait envoyé un article paru dans Médiapart : Ils avaient vécu une suppression de subvention, après un théâtre invisible qui n’avait pas plu à la préfecture. La situation : chez eux, de nombreuses méga-bassines sont en projet (comme celle de sainte Soline); Ils avaient monté et joué la scène suivante : un stand supposé être « de la préfecture » annonçait que l’eau étant maintenant réservée aux méga-bassines il fallait donc s’habituer à boire… de l’urine ! Ils proposaient donc aux passants des bouteilles « d’urine de Préfet » en disant que celui-ci « avait décidé de payer de sa personne »… Hm… ça n’a pas plu en haut lieu !

La question qui nous brûlait les lèvres :
«pourquoi proposer d’AJOUTER un personnage, plutôt que de REMPLACER l’opprimée » ?

Pour eux, dans les spectacles de rue, c’est d’abord une question de rapidité, les gens passent, tout va très vite, et il serait difficile de remplacer l’opprimée, alors qu’on en a juste vu une image animée, sans en connaître davantage. Le risque serait aussi de culpabiliser la « victime ». Du coup, notre échange se poursuit sur la différence entre VICTIME et OPPRIMEE.

Pour JF, Quand on met en scène une VICTIME, donc quelqu’un qui ne peut rien faire à la situation, on préfère en effet ne pas proposer de la remplacer, mais on met en scène un personnage ALLIE qui tente ce qu’il peut, sans y parvenir. Celui-ci on peut le remplacer.Explications : La victime d’un viol ne peut réagir que selon ce que son « amygdale » (une zone très ancienne du cerveau) a prévu : la Fuite, le Combat, ou la Sidération (être sidéré, comme mort). Ce n’est pas un choix, pas un raisonnement, c’est un réflexe auquel la victime ne peut rien. Il est donc inutile de la remplacer pour lui dire, par exemple « bats toi » si son amygdale est programmée pour « faire la morte ». Par contre, l’opprimé·e a une marge de manœuvre. L’opprimé·e a une volonté et se demande comment la mettre en oeuvre. Dans un théâtre forum il ou elle demande des idées au public, du moins à celles et ceux qui subissent la même oppression, et on en débat tous, à égalité.


Pour Nicole : on revient toujours à la question de « QUI raconte l’histoire », et quand on crée des modèles d’après enquête et non pas à partir du récit de quelqu’un qui est là, on se retrouve toujours dans un certain flou concernant ce qu’on va oser demander au spectateur.Si on revient à la question initiale : « QUI ICI veut changer quelque chose et n’y arrive pas », pour moi c’est plus simple, ça peut être même la victime, ça peut être un allié.Par ailleurs se poser cette question peut faire qu’on va décider de montrer plutôt telle ou telle sorte de personnage victime/opprimé (personnage complètement paralysé et impuissant (cela existe dans la vie), auquel cas il faut un allié possible (un témoin), ou personnage qui tente kekchose même maladroitement.Je comprends très bien la position prise, concernant un spectacle de rue.

On se quitte alors qu’ils vont repartir dans la soirée à Poitiers, en camionnette. Ils sont intéressés par le réseau, par ses formations. On espère les voir les 6 et 7 avril 24 pour la rencontre N°19, et peut-être avant, à Poitiers.

Texte de JF jf.martel@orange.fr complété par Nicole missgriffassociation@hotmail.com
relu et corrigé par Benjamin des « Arlette Moreau ». 27/11/23

Avec un groupe nombreux

AVEC UN GROUPE DE 70 PERSONNES, QUELS JEUX ?
La question était posée par nos amis de L’attelage le 6/1/23 lattelage.tf@gmail.com «  Pour les besoins d’une intervention avec un groupe de 60-70 personnes (des membres de communauté professionnelle territoriale de santé) nous sommes à la recherche d’un petit jeu d’introduction. On fait rarement des interventions avec autant de monde et c’est une interrogation qu’on a souvent, alors c’est l’occasion de demander au réseau » Frédérique et Cyprien.

4 réponses successives :
1/4: de JF (Lille) jf.martel@jf…
Quelques idées (pas originales ) que j’ai proposées avec un grand groupe (GG) ou en spectacle de TF avec toute la salle (TF).
Bien Entendu : l’hypnose colombienne (guider l’autre avec sa main) et ses variantes.
De même guider son aveugle (la voiture aveugle) sans oublier de faire la réciproque.
1,2,3 de BradFord (remplace le 1 par un geste et un son, puis le 2 le 3 ) il me semble que la plupart de nos jeux à deux fonctionnent…
Il m’arrive, si la salle est assez grande, de diviser en deux groupes, si on est deux animateurs….
Compléter l’image bien sûr, occuper l’espace et se regrouper, le cercle de noeuds (en 2 sous groupes), hommage à Magritte, les machines, les rituels (tjrs en 2 x 30 ) je ferais aussi du théâtre image en 2 x30 ).
J’ai eu un GG comme ça sur l’accompagnement des migrants, une seule journée d’intervention, dans le Tarn et nous avions regretté de ne pas avoir fait 2 sous-groupes, car nous avions à la fin 12 scènes à regarder et… c’est trop ! Peut-être créer 6 scènes dans chaque sous-groupe, les travailler en sous-groupe, puis n’en présenter que deux en tout en GG, ça aurait été mieux !
La main perdue (et retrouvée) en deux sous-groupes…
Note : se pose aussi le critère de séparation entre les 2 groupes : le hasard ? Ou une appartenance différente ? À réfléchir !
Amicalement Jean-François 

2/4 d’Armande, (Genève) armande088@gmail.com
Ce que je fais quand j’ai un grand groupe qui est d’accord avec le fait de se toucher les mains. C’est le jeu des bonjours. Chaque personne serre la main d’un autre et ils ne peuvent pas la lâcher tant que chacun n’ont pas trouvé une autre main à serrer. Ça fait des couples qui s’échange. Permet de se dire bonjour ou/et son nom, etc. 
Ou le jeu du coup d’œil. En cercle, quand on attrape le regard d’un autre on change de place avec lui-elle en traversant le cercle en essayant d’être à la même cadence et sans s’entrechoquer avec d’autres qui font la même chose en même temps. 
Voilà. Belle animation! Armande

De Nour, groupe A l’affût (Paris) compagniealaffut@gmail.com
Voici un jeu que je n’ai jamais fait avec un groupe aussi nombreux mais je pense que ça peut fonctionner si le groupe est à l’écoute. 
Demander aux participants de dessiner un cercle imaginaire (dans l’air- devant soi) avec la main droite en tournant l’index dans le sens de l’aiguille d’une montre. 
Et dans un deuxième temps avec l’index de la main gauche dessiner un carré. 
Et dans un troisième temps demander au groupe de dessiner, en même temps,  un cercle avec l’index de la main droite et un carré avec l’index de la main gauche. C’est difficile d’y arriver 🙂  
C’est pour cela que juste après le jeu et avant de joker une situation on peut dire à l’assemblé une phrase de type : Ce que nous allons faire maintenant et beaucoup plus simple de ce que nous avons tenté lors du jeu ; histoire de démystifier la partie théâtre forum.
Amusez vous bien. Nour

de Julien, de l’association Un pas de côté, (Angers) julien.estival@un-pas-de-cote.org
J’ai fait une matinée de jeux à 70 (avec des 16-30 ans). Cela dépend du temps devant, mais le Moustique burkinabé avait très bien fonctionné et cela donnait quelque chose de très chouette de voir une dizaine de moustique circuler dans un énorme cercle. On était 4 en animation (1 principal et 3 en relai) :
1/ Faire tourner un moustique en 4 sous-groupes pour que tout le monde intègre le jeu (5-15min)
2/ En cercle, prendre bien le temps d’expliquer qu’on va lancer plusieurs moustiques et c’est parti (5min)
3/ Selon le thème qui suit, il est possible de rebondir : sur le rythme collectif que vous invitez les participant-e-s à prolonger, sur la solidarité nécessaire / regard que vous invitez à porter sur le forum qui suit, sur le fait que les participant-e-s viennent de faire du théâtre sans s’en rendre compte et que vous les invitez à garder cette énergie / intervention forum, etc…
On avait aussi fait un espace stop à 70 (cadre plus institutionnel, pour un réseau d’initiative jeunesse). C’était très chouette pour entrer en douceur dans le thème :
1/ Comme sur un immense radeau qu’il faut maintenir stable, tout le monde se déplace et circule en se répartissant, en comblant les vides et en anticipant les trajectoires des autres. Quand vous claquez des mains, chacun-e s’arrête et on observe si on est bien réparti sur le « radeau ». On « triche » éventuellement en comblant les vide, avant de repartir.
2/ La prochaine fois que vous allez taper dans vos mains, les participant-e-s vont devoir se répartir selon des critères objectifs : par 2, 3, 4, 15 – le plus rapidement possible
3/ Idem avec par exemple : couleur des chaussettes, puis couleurs des yeux
4/  Idem avec des éléments qui se rapprochent de votre forum (ou autre). Pour une intervention sur les discriminations racistes, on avait commencé par : plats préférés, insulte favorite (ou la plus entendue)
5/ Vous vous placez au centre de la salle, vous indiquer le nord et vous invitez les participant-e-s à se positionner selon l’endroit d’où ils viennent, pour former une « carte humaine » : cela peut être l’endroit où chacun-e habite, travaille ou son lieu « d’origine » (pour introduire cette question omniprésente visant les personnes racisées), etc…
Il y a énormément de variantes à essayer. L’important est la gradation des consignes, et de terminer par quelque chose de spécial : carte humain, image ou mime du mode de transport utilisé pour se rendre dans la salle.
Côté technique, j’ai constaté que cela marchait mieux à la voix (avec des crieuses et crieurs qui faisaient le relai des consignes) ou avec un mégaphone, qu’avec un micro – qui écrase la voix et qui crée une « interface » entre les gens et le joker ou la jokeuse.
Bonne inspiration ! Julien

Voyage dans le réseau : le privilège blanc.

le privilège blanc (JF martel)

Réflexions personnelles sur le privilège blanc (JF Martel, 7mai 2022) A partir du forum de Naje et d’une intervention de Saïd Bouamama.

J’ai beaucoup apprécié le théâtre forum de Naje sur « le racisme structurel et le privilège blanc » fin avril 22, ces scènes que Naje a construites avec un groupe de militant·es de la LDH et des ami·es de naje racisé·es. Bravo !
J’ai noté quelques idées nouvelles de mise en scène:
Tout d’abord, deux jokères, l’une racisée, l’autre blanche. J’ai noté le bref récit, avant le spectacle, qui expliquait que pendant l’année qu’ont duré les ateliers de créations, certaines personnes avaient décidé… de finalement se considérer comme relevant de l’autre statut ! « blanc » X « racisé ».
J’ai aussi noté la trouvaille à propos de ce fait : pendant la partie forum, les acteurs-oppresseurs restent en scène, et les opprimé·es sont remplacées par le public.
Or, cela a une conséquence non désirée :
Les personnages oppresseurs dans ce type de situation sont, bien entendu, des hommes blancs, joués par des acteurs blancs ! Si bien que les acteurs blancs restent beaucoup sur scène pendant le forum. Frustrant pour les actrices racisées, non ?
Que faire ? La trouvaille a été de proposer un masque blanc, en fait gros un panneau blanc -genre raquette de tennis opaque – que l’actrice racisée tient devant elle pour intervenir en jouant un oppresseur !

Mais si j’ai aussitôt vu le racisme à l’oeuvre, les discriminations, l’oppression, je cherchais à voir… le « privilège blanc » ! Où se cachait-il donc ?

Quand les femmes racisées se taisent et que le délégué syndical, homme blanc, parle… Je vois d’abord (moi) une oppression vécue par les femmes racisées, d’autant plus que l’homme parle à leur place, de leurs propres situations ! Je voyais une domination d’un « blanc » sur des « racisées ». Donc une oppression que je connaissais déjà…
Mais Fabienne, en relisant ce texte, me rappelle (entre autres) la scène du magasin qui montrait directement un privilège blanc : le vigile dit à deux femmes blanches que « si elles ont quelque chose dans leur sac » ?… Mais n’ose pas les fouiller !
J’avoue que sur le coup, depuis la salle, le tableau ne m’avait pas frappé…
Un peu comme me promener dans la rue et « ne pas être contrôlé » je ne le vis pas immédiatement comme un privilège… s’il n’y pas un contrôle au faciès à côté !

Au cours de la rencontre du réseau TO, avril 2022, l’intervention de Saïd Bouamama sur cette question du privilège blanc, m’a, semble-t-il, éclairé. Dîtes moi si ça vous parle !
(vous pouvez mettre librement des commentaires sur le site, voir en fin d’article) .
D’abord la question de Saïd : « quand on dit « privilège » tu penses à quoi » ? Je réponds aussitôt : « nuit du 4 août 1789, abolition des privilèges ! » Mais Saïd continue :- disons par exemple que toi et moi, on sort d’une manif, à Lille. Tu rentres tranquillement, et moi, algérien, je crains d’être contrôlé « au faciès ». Disons aussi que si toi, tu veux aller faire du TO dans un pays étranger, tu obtiens ton visa rapidement, ou même tu n’en as pas besoin ! Alors que moi, il me faut parfois 6 mois pour avoir le visa avant d’aller faire une conférence.. ». etc…
Alors, abolition ? Non ! Nous ne demandons pas que tout le monde doive espérer 6 mois ou plus pour un visa ! Nous ne voulons pas que tout le monde s’attende à être contrôlé dans la rue !…

Nous ne cherchons l’abolition du privilège blanc !!!!
Nous voulons l’extension des privilèges blancs… A toutes et tous !

Ainsi, dans un forum, montrer le privilège blanc, ce pourrait être montrer le racisme et les discriminations subies, (ce que nous faisons bien entendu) mais aussi tenter de montrer que les « blancs », eux, ne vivent pas ces discriminations ? (le TO pour « rendre visibles les oppressions »). Qu’en dîtes-vous ? En tout cas, la formule m’a frappé.

Relu par Saïd et complété par Fabienne. Merci à elle et lui.
JF Martel 7 mai 2022 jf.martel@orange.fr 06 85 54 99 68

Témoignage: mes besoins cachés, UNE TECHNIQUE INTROSPECTIVE.

par JF Martel
Mon histoire est choisie, et je choisis la technique à utiliser. Je ne l’ai jamais vue !
Cette technique, inspirée par la CNV (communication non violente) est centrée sur les besoins non satisfaits, plutôt que sur la volonté. Derrière chaque ressenti négatif, il y aurait un besoin non satisfait »
D’abord, je cherche mes « passeurs », pour reprendre le terme utilisé par Fabienne et naje. Je trouve : APTG qui m’a encouragé à faire de la photo, Claude, et sa pédagogie Non Violente, AB et sa bienveillance quand je suis arrivé au TO.
Bruno : « Ces passeurs sont sculptés à l’aide de trois participants. Tu les as placés dans l’espace autour de toi, à l’endroit le plus révélateur de l’énergie qu’ils t’ont transmise. Les jokers t’ont proposé de leur trouver pour chacun quelques mots qui pouvaient résumer ce qu’ils t’ont apporté. Tu as pu vivre un petit moment au milieu de ces passeurs te répétant ces mots que tu leur as donnés ».
Ensuite, mon récit: c’est un récit du passé lointain, issu de ma carrière d’instituteur, qui est derrière moi, donc… à laquelle je ne changerai rien ! Mon impuissance énervée dans ma relation avec une élève précise : F. elle est effacée, mutique, sans initiative… Mais, c’est quand même actuel : ce travail pourrait me servir avec d’autres enfants, mes petits-enfants, ou d’autres, si je comprends un peu ce qui m’a bloqué et me bloque encore.
J’improvise l’histoire, avec des acteurs que je choisis. F. sera jouée par une femme, Do, avec qui j’ai travaillé ce matin et qui se trouve être (comme par hasard!) institutrice. F, comme d ‘autres élèves, vient me montrer son travail, pour obtenir des corrections, des suggestions, etc.… elle avance, le regard baissé, comme d’habitude, ses mains pendant, croisées en haut de ses cuisses, tenant son cahier. Elle est constamment doublée par d’autres enfants, qui posent rapidement un cahier sur mon bureau, sont volubiles, demandent un conseil et repartent vite. Parfois même, d’autres cahiers recouvrent celui de F sur mon bureau, tandis que je tente de croiser, capter son regard, en vain. Puis je dois quitter mon bureau, ce moment dédié aux corrections est terminé, je suis réclamé par un groupe de travail. F. n’aura pas eu de réponse… aux questions qu’elle n’a pas posées !.. C’est affreux ! Fin de l’impro.
Je sculpte ensuite 3 ressentis :
-mon envie de la secouer par les épaules
-lui vomir dessus avec une grimace
-la supplier à mains jointes
3 participants prennent les trois images des trois ressentis, et rejouent chacun leur tour la scène en étant uniquement ce ressenti avec cette image.
A la fin de chaque improvisation, les jokers me demandent de m’adresser au personnage qui jouait mon ressenti et de lui dire : « tu es mon besoin de… et je suis insatisfait quand…. »
Très important : ce besoin doit être exprimé comme un besoin universel éprouvé par tout humain·e.
Un besoin me marque profondément : (j’ai même oublié les autres !)
-j’ai besoin de rencontrer l’humanité de F. et je suis insatisfait quand je n’y arrive pas »
Bruno « Les jokers t’ont demandé quel était le besoin insatisfait qui semblait le plus pertinent à visiter ce jour-là. Puis ils t’ont proposé de retrouver tes passeurs pour que tu puisses imaginer que grâce à leur aide, tu avais pu trouver dans d’autres circonstances les ressources nécessaires pour satisfaire ce besoin universel. Et donc au milieu de tes passeurs, fort de cette « imagination », tu as été invité à rejouer la scène de départ avec les mêmes partenaires. Un des buts étant de vérifier par le théâtre si ce besoin non satisfait est bien le principal dans cette scène ».
Dans l’impro finale, j’ai fini par accéder aux feuilles de F. et corriger son travail ! Comment ? Do, qui joue F. a eu un grand soulagement, dit-elle, quand je me suis intéressé directement et activement à ses feuilles et… pas à elle ! J’ai ouvert ses feuilles, les ai regardées, sans que ni F. ni moi ne disent rien ! Sinon, elle aurait eu encore trop peur… Je crois même (j’en suis sûr) avoir croisé son regard après avoir corrigé son texte, avant qu’elle ne reparte…
Bilan en grand groupe, échanges…
Ce que j’en tire :
Je savais déjà, bien sûr, que F. avait peur de moi (et des autres). Mes tentatives pour entrer directement en relation étaient souvent vaines. En pédagogie Freinet, nous nous disons souvent « remettre l’enfant au centre » au centre de ses apprentissages, ses découvertes, etc… C’est un enfant, une personne, avant d’être un élève. Mais là, clairement, la relation ne pouvait qu’être médiatisée : ici, médiatisée par son cahier ! Il lui fallait que je regarde son cahier, pas elle ! D’autant qu’elle devait bien sentir que cette attitude introvertie n’était pas ce que j’espérais… Elle était donc jugée avant d’avoir montré quoi que ce soit. Il me fallait donc ici, faire un peu comme ces maitres traditionnels qui corrigent des cahiers HORS de la présence de l’enfant lui-même ! Moi qui croyais tant que c’est en lui montrant les erreurs, en la faisant les débusquer, que je pouvais l’aider à progresser… Sans doute, avec beaucoup cela fonctionnait ainsi. Mais F. avait besoin de beaucoup plus de distance… « Quoi ? Celle-ci ne m’aime donc pas » ? « avec tout ce que je fais pour cette classe ? » voilà ce que je devais me dire, en lui en voulant ! Et c’était le blocage.
Avec les enfants et d’autres, je sais que j’ai plus de mal avec ceux qui sont distants, qui ne « disent pas » ne se livrent pas beaucoup. Or, respecter la distance dont ils ont besoin, ce serait peut être prendre en compte leur travail, leur chant, leur découpage, leur dessin, leur puzzle, m’attacher à en dire des choses, éventuellement même à corriger, rectifier, mais en me centrant sur la production elle-même, pas tout de suite sur l’enfant ! Mais… c’est pour moi, une attitude « contre intuitive ».

Voilà, il m’a fallu atteindre 70 ans et cette journée de stage pour formaliser cela !
Merci. JF Martel jf.martel@orange.fr (texte relu et complété par Bruno) ficelleetcompagnie@netcourrier.com

TECHNIQUE INTROSPECTIVE: MON BESOIN CACHé

Le besoin caché
Je veux mais les autres ne veulent pas : J’ai des attentes, des envies qui ne sont pas satisfaites, auxquels les autres ne répondent pas
Situation : Je veux mais les autres ne veulent pas. J’ai des attentes, des envies qui ne sont pas satisfaites, auxquels les autres ne répondent pas. Il peut aussi s’agir de quelque chose qu’on a du mal à faire/à dire à quelqu’un, des attentes, des besoins qu’on arrive pas définir ou à respecter par rapport à soi-même. Situations où l’on a envie de fouiller en soi ses propres besoins, et non pas « ce que je veux ». Je sens qu’il y a un mélange entre désir et besoin. Déroulé :
1. Première improvisation :
Monologue intérieur avant de démarrer.
Improvisation de la scène : la scène s’arrêtera quand on aura vu le conflit, le problème, l’insatisfaction. On ne la résout pas sur la première improvisation. .
1bis. Monologue intérieur :
Monologue intérieur après la scène : Quelles sont les pensées principales qui m’habitent après la scène ? Le protagoniste essaye de les faire dérouler, les pousser et se laisse aller à l’improvisation.
Consignes : « monologue libre sur ce qui vient de tes ressentis, de tes jugements sur toi même ou sur l’antagoniste après avoir vécu cette scène. Ou d’autres choses qui sortent… »
Consignes pour le public ensuite : Le public va ensuite venir sur scène et donner à entendre et voir une posture – image / une phrase – un mot que la personne a faite / dite et qui l’a marqué, qu’elle a retenu.
Option A : La personne (protagoniste) a surtout eu des jugements / auto-jugements : étape 2
Option B : Si la personne a surtout eu des ressentis : étape 3 on va construire l’image de ces ressentis.
Option C : Si la personne a évoqué des besoins : étape 6
2. Auto-jugements / Jugements :
Face à chaque auto-jugements / jugements, on crée des images des ressentis, du sentiment qui amène à ça, qui fait dire ça…
Puis, on va proposer des images des sentiments : face à chaque chacal, le protagoniste va proposer une image de son ressenti. Le public peut l’aider. Quelqu’un du public prend l’image.
3. Les images des ressentis :
On construit l’image ou les images du ressenti que le protagoniste a pu exprimer lors du monologue intérieur post-improvisation initiale.
(Attention : un vrai ressenti au sens CNV. Pas vis-à-vis d’un autre).
4. Nouvelle improvisation avec ressenti :
Le protagoniste (et l’antagoniste éventuellement) choisit le sentiment qui lui semble le plus fort. La personne du public qui fait l’image du sentiment va donc rejouer l’improvisation en étant que ce ressenti de façon amplifié.
5. Recherche collective des besoins cachés :
– Soit on rejoue la scène et en mode théâtre forum, on tape dans nos mains et monte sur scène pour faire des propositions de besoins.
– Soit à la façon forum éclair, la personne qui fait l’image du ressenti se place au milieu et tout le monde fait des propositions, le protagoniste choisit une image et formule la phrase : « Quand je me ressens comme ça, c’est mon besoin insatisfait de… »
6. Recherche des « passeurs » :
Travail personnel du protagoniste de recherche des 3 figures qui l’ont aidé ou l’aident aujourd’hui à satisfaire ce besoin dans sa vie. Crée 3 images de ces 3 figures et leur donne une phrase à dire, peut nous dire qui ils sont pour lui. Des personnes du public viendront prendre chaque image + phrase.
7. Improvisation finale :
Le protagoniste se place sur la scène et place ces 3 figures aidantes autour de lui. Temps de méditation où le protagoniste va imaginer en lui ce besoin comme étant satisfait. Et petit à petit les 3 figures s’activent pour l’aider dans cette recherche. Puis démarre l’improvisation initiale avec la satisfaction du besoin.
Et improvisation finale à proprement parler, face à l’antagoniste, avec éventuellement intervention des figures passeurs quand nécessaire.
Si besoin : Si le protagoniste sent que ce n’était pas tout à fait ce besoin qui était le plus important, on refait les étapes nécessaires.

Texte de Noémie  (Ficelle et Cie) nomiedumont@yahoo.

Voyage: Une technique introspective chez les « Ficelle et Cie »

Un atelier « forum et paroles » CHEZ LES « FICELLE »
Samedi : c’est le dernier jour de ma semaine dans le groupe, début décembre 2019
Une journée de techniques introspectives, animée par Bruno et Noémie.
Bruno, qui a suivi un de mes stages de formation à Lille à ces techniques, voilà quelques années, me reçoit chaleureusement, et me présente comme un « historique » du TO en France ! C’est très sympa de sa part d’accepter son ancien formateur parmi les participants, j’apprécie ces relations, où on peut être tour à tour formateur et participant.

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Voyage dans le réseau TO: forum avec des « designers »

Un voyage dans le réseau TO : Un atelier de « DESIGN FORUM »

Vendredi 18 septembre 2020, le voyage fut assez bref pour moi, car il s’agissait du théâtre forum créé par naje pour la MEL (Métropole Européenne de Lille) donc… dans ma ville ! Fabienne m’avait bien sûr fait inviter à ce qui était lié à l’évènement de l’automne : « Lille, capitale mondiale du design » Rien que ça ! Son commanditaire: SDS, un cabinet de designers bruxellois. www.strategicdesignscenarios.net J’étais intrigué ! Récit :

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voyage dans le réseau: un forum design !

Un voyage dans le réseau TO : Un atelier de « DESIGN FORUM »

Vendredi 18 septembre 2020, le voyage fut assez bref pour moi, car il s’agissait du théâtre forum créé par naje pour la MEL (Métropole Européenne de Lille) donc… dans ma ville ! Fabienne m’avait bien sûr fait inviter à ce qui était lié à l’évènement de l’automne : « Lille, capitale mondiale du design » Rien que ça ! Son commanditaire: SDS, un cabinet de designers bruxellois. www.strategicdesignscenarios.net J’étais intrigué ! Récit :

Deux jours de travail de Fabienne et Farida, avec un groupe de 10 personnes pour préparer ce spectacle. 5 « designers » et 5 « porteurs de projet » sur le thème « ville nourricière, alimentation durable ». Comme d’habitude : ils ont raconté, et elles ont mis en scène plusieurs petites pièces, sur lesquelles on a fait forum. Bien entendu, tout le monde est masqué (j’ai des photos de Fabienne en jokère masquée, super!).

Fabienne présente, puis fait venir tout le monde (tous masqués) sur le plateau, et dans une ambiance bon enfant, propose des jeux : guider son aveugle par le prénom, avec réciproque puis partage des ressentis. Très sympa.

Ensuite, elle nous propose de nous présenter. Quand une des actrices annonce : « chargée alimentation durable pour la métropole lilloise », je glisse « tu vas pouvoir nous parler de la ferme urbaine de St Sauveur ?? »  « euh…, non… »  Petit froid chez les organisateurs, je n’insiste pas.

La friche St Sauveur, en effet, immense, est une ancienne emprise SNCF-FRET en plein centre ville, qui fait l’objet de conflits depuis des années entre : d’une part les associations d’habitants, les environnementalistes, les mouvements de gauche et écolos, des groupes qui en occupent déjà une (petite) partie, et d’autre part la Ville de Lille, qui veut y créer un lieu prestigieux (notamment des immeubles de bureaux, une piscine olympique etc…)
Ambiance lors des dernières municipales !

LES 4 SCENES ET LE FORUM :

Très fluide. Une dizaine d’interventions, dont plusieurs d’un paysan venu du Pas-de-Calais, département voisin.

D’abord « pour se mettre en train » une série de scènes très brèves qui présentent des désaccords dans un couple : du genre aller aider ou pas la paysan de l’AMAP à récolter les carottes ce dimanche matin. Le public choisit d’intervenir sur celle-ci. « qui est d’accord avec lui » ? « qui est d’accord avec elle » ? Fabienne choisit de remplacer les deux acteurs simultanément, par deux personnes du public. J’interviens ensuite, à la place de la femme qui propose d’y aller dimanche. Face à moi, l’acteur est un des designer… un peu cabotin. Je monte sur scène, (les cheveux au vent comme d’habitude). Lui : « rappelle moi le nom de ton coiffeur » Fabienne se prépare à lui taper sur l’épaule pour le faire revenir dans le jeu et dans son personnage, mais je parviens plus ou moins à rattraper sa « sortie de jeu » en intégrant sa remarque dans notre couple : « change pas de sujet, mon chéri, il est pas question de mes cheveux, mais d’aller à la ferme » etc… Rires dans le public.
Une remarque sur les enjeux de la scène : les échanges d’opinion (dans ces couples ou dans la scène 4 autour des jardins partagés) ne semblaient pas avoir de conséquences concrètes qui opprimeraient quelqu’un, et contre lesquelles on pourrait lutter.

Ensuite une scène où un collectif aux multiples projets veut occuper un bâtiment déserté, bien dégradé déjà. Il est estimé à 2,8 millions d’euros. Evidemment, de rencontre en rencontres, ça traîne, et quelques années plus tard, encore bien plus abîmé, il va être acheté pour… 0,3 millions seulement, MAIS par une société d’HLM ! Forum.
Le collectif est reçu par l’administration qui répond systématiquement « montez donc un projet détaillé par écrit, on l’étudiera » (puis demande un autre projet, etc… ) Une intervention originale : le spectateur sur scène rétorque au directeur administratif : « vous voulez acheter ce bâtiment, OK, montez un contre projet détaillé, par écrit, sans tarder, et nous, on le lira avec intérêt » ! Rires et applaudissements !

Une remarque sur les personnages : les collectifs joués dans cette scène (et dans la scène suivante) comportaient 3 ou 4 personnes à peu prés identiques. Une seule personne parlait dans les modèles. Avec plus de temps de travail, on pourrait évidemment préciser des lignes et des compétences différentes pour chacun.

Autre scène : un paysan va perdre son fermage, les terres seraient reprises par le propriétaire (une grosse chaîne d’hypermarchés) pour y produire directement…. du « bio local à grande échelle ! Face à cela un collectif veut maintenir le paysan, l’aider à la conversion bio, et ajouter d’autres projets. Une intervention du paysan du Pas-de-Calais met l’accent sur les accords existants entre ce géant de la grande distribution et la « profession agricole»,  accords qui risquent de souffrir, vu que la « profession » s’oppose à l’expulsion de ce fermier… Une autre intervention veut interpeller les élus de la commune. Synthèse de Fabienne qui souligne le conflit de valeurs : défendre le paysan « conventionnel » mais qui fait partie du pays, et de l’autre côté promouvoir du « bio » adossé à une multinationale !

Une remarque sur l’oppression principale : Parfois elle était peu mise en évidence. J’ai regretté par exemple que le paysan expulsé disparaisse du modèle dès le début de l’histoire. Quels étaient ses rapports avec ce « collectif » ? L’acteur a eu, je pense, une bonne réaction spontanée, quand à la fin il a fait resurgir son personnage depuis les coulisses en criant « et moi ? Je deviens quoi » ? mais ça n’a pas eu de suite.

La dernière scène porte sur les jardins urbains partagés. Les jardiniers sont aux prises avec le scepticisme des passants, voire leur mépris. Dans une des interventions, uen spectatrice rétorque : « vous dîtes que c’est idiot de planter des poireaux sur les trottoirs, et vous ajoutez « pourquoi pas sur les rues pendant que vous y êtes ? » Moi je vous réponds : « Vous, vous le savez que les bagnoles c’est bientôt fini ? Alors on va en effet pouvoir récupérer une grande partie de la surface des rues pour les transformer en jardins » ! rires.

Fabienne clôt et organise un retour (chacun un mot) sur ce qu’on vient de vivre. Moi, Je pense qu’elles s’en sont bien sorti, et je leur dis mon bravo.

Mes remarques sur le projet lui -même

L’invitation reçue des organisateurs (à la demande de Fabienne) était alléchante : Atelier de Design Forum 

Le design dans la ville collaborative, mis en scène par des récits, des témoignages, des histoires (…) emprunte les formes (…) du théâtre forum (…) pour mieux raconter la valeur de ce design qui écoute les gens, collecte des témoignages, requestionne la demande, met les idées en récits, communique les solutions à travers des histoires (…) spectacle expérimental de Design Forum : plusieurs acteurs de la transition alimentaire partageront leurs récits sur l’agriculture urbaine et l’alimentation durable, exploreront les enjeux, les synergies mais aussi les divergences entre leurs projets et inviteront les spectateurs à « faire forum »(…) Votre présence en tant qu’acteur.trice partie prenante des questions d’agriculture urbaine et d’alimentation durable sur le territoire est très importante.

Pourtant, dès mon arrivée, une surprise… de taille :

dans la salle de 24 spectateurs, (covid oblige), je ne reconnais AUCUNE personne ! Je suis lillois depuis 20 ans, administrateur pendant plus de 10 ans de la MRES (Maison Régionale de l’Environnement et des Solidarités, qui est forte de 117 assos (dont TOP-Théâtre de l’Opprimé) et surtout de nombreuses assos environnementalistes… et je ne vois aucune personne des mouvements locaux ! Sur scène, outre les designers, sur les 5 « porteurs de projet » seul UN gars d’une asso para-municipale de jardins d’insertion, aucune autre personne du mouvement associatif local (aucune non plus dans la salle) les 4 autres sont des institutionnels de la Métropole.

Je tombe le lendemain sur 2 pages dans Télérama, sur Lille, les designers, le design, (qui en anglais semble être entendu au sens de « dessein » « projet » et pas d’objet dessiné ou de tableau)… Ces designers seraient là pour aider à ce que les élus et l’administration écoutent les « gens » et que ceux-ci développent des « projets » puis pour vérifier que ce qui est mis en place ensuite correspond aux projets énoncés !!! (à lire, ça semble très louable ! Mais ils ont pas inventé l’idée non plus…)

Je comprends les doutes de Fabienne, mais bravo quand même ! Je sais que vous avez travaillé bien tard la veille, au lieu de venir manger et dormir chez moi comme c’était prévu, et passé le reste de la nuit sur place dans des canapés… Quelle énergie ! Résultat :la séance se tenait tout à fait bien, (j’ai trouvé), malgré la commande et son contexte discutable. Bien sûr, vu le public et les participants, on peut avoir des doutes sur l’impact du TO sur l’agriculture urbaine et durable à Lille.

Quelques autres remarques sur le déroulement de la séance et les scènes.

En précisant que je n’aurais pas aimé être à la place de Fabienne ou de Farida dans ces conditions, entre ami.es du TO, je vous partage quelques remarques «techniques TO ».

En deux jours, il faut d’abord recueillir les récits ! Ensuite, c’est difficile de trouver le temps de faire émerger les enjeux, les volontés, se mettre d’accord sur l’oppression réellement vécue, sur nos buts, et s’entrainer à jouer les conséquences des propositions, et aussi approfondir les personnages ! (voir mes remarques amicales dans le corps du récit, ci-dessus).

Le jokage : Fabienne me semblait tranquille, son explication du forum était on ne peut plus brève (je crois qu’elle a battu des records de durée, là ! ) : « vous êtes plutôt d’accord avec qui ? Elle ? Lui ? Alors, venez le ou la remplacer, pour que ça se passe mieux ».

Sur le premier remplacement, où deux spectateurs sont venus remplacer simultanément : celui qui ne voulait pas aider à la récolte de carottes, et celle qui voulait y aller, il me semble (ce n’est que mon avis) que les faire venir l’un aprés l’autre aurait mieux permis de « monter une gamme » d’arguments ?

Jouer les conséquences des propositions : il est évident qu’en deux jours, les participants n’y étaient pas prés. Parfois je m’attendais à ce que ça « clashe » ou que le ton monte. Comment faire ? La jokère ne peut évidemment pas jouer à la place des acteurs oppresseurs. Je me dis aprés coup, que la présence sur scène de l’autre animatrice (ici Farida) pourrait parfois soutenir l’acteur oppresseur et l’aider à « monter » un peu ?

Amicalement, JF Martel le 12 octobre 2020. Ce texte a été soumis à Fabienne et Farida le 4 oct, pour échanges et accord de publication, comme le prévoit la charte de notre liste de discussion qui précise notamment « ne pas parler du travail d’une personne avant d’avoir, au minimum, échangé avec elle » Vos remarques et questions sont les bienvenues. Nous joindre : jf.martel@orange.fr, farida.aouissi@gmail.com, fabienne.brugel@orange.fr